Cacao by Amado Jorge

Cacao by Amado Jorge

Auteur:Amado, Jorge [Amado, Jorge]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Hérétiques
Publié: 2011-10-28T04:00:00+00:00


La mère Margarida vendait du tafia verdâtre (il y avait une croix à l’intérieur de la bouteille) au milieu de la route. Une grossière cahute de paille. Les cinq gosses couraient dans la brousse, nus, le visage haché de cicatrices dues aux épines. Je ne sais pourquoi le Colonel tolérait ce petit commerce de la mère Margarida à l’intérieur de la propriété. Usée par les chagrins, elle paraissait cinquante ans ; mais je pense qu’elle avait à peine la trentaine. Son histoire serait qualifiée par les écrivains d’horrible tragédie, si les écrivains venaient sur les plantations de cacao.

Le mari, condamné à dix-huit ans, purgeait sa peine en prison. Histoire toute simple du sud de l’État. Ils étaient venus du Ceara, il y avait bien longtemps de cela. Le mari s’était trouvé devenir « fermier » du Colonel Henrique Silva, à Palestina.

Intéressante forme de contrat de travail que l’affermage. La propriété charge un chef de famille du défrichage d’un coin de forêt et de l’établissement d’une plantation sur le terrain. Le « fermier » reste maître du terrain pendant les deux ou trois années du contrat. Il plante du manioc et des légumes, avec quoi il vit. Et en fin de contrat le patron paie de 500 à 800 reis le pied de cacaoyer.

Osvaldo, le mari de Sinha Margarida, avait fait une affaire de ce genre avec le Colonel Henrique Silva. À la fin du bail, il voulut aller recevoir son argent. Le Colonel ne paya pas. Lui alla à Ilhéus trois ou quatre fois se plaindre aux autorités. À la fin le commissaire répondit :

— Ce sont des querelles de bonnes femmes, ces histoires-là. Réglez ça en homme.

Osvaldo repartit, et, le soir, il tua le Colonel à coups de couteau. Le procureur fit une belle harangue, citant la Bible et déclamant des vers. L’avocat de la défense (qui n’était pas payé) ne fit aucun effort. Le jury, composé de propriétaires, condamna l’accusé à dix-huit ans, pour faire un exemple. Sa femme et ses enfants vinrent le voir à la prison. Il pleura pour la première fois de sa vie. Et maudit le cacao.

Sinha Margarida avait erré au hasard. Elle avait fini au Domaine Fraternité, à vendre du tafia. Les gosses aidaient déjà les ouvriers à la mise en tas et gagnaient 500 reis par jour. Malgré sa haine du cacao, elle avait peur de retourner au Ceará avec la sécheresse. Ici, du moins, ils mangeaient. Il y avait des jaques en abondance.

La propriété du Colonel Misael, la plus grande de l’État, occupait une superficie immense. Notre case et une trentaine d’autres se trouvaient au centre du domaine, mais certaines en étaient distantes d’une lieue ou une lieue et demie. Le jour des « sacs », le samedi, tous les ouvriers se réunissaient devant l’économat, en attendant que João Vermelho prît son service. Dans la cour de la maison de maître, des poules et des poulets picoraient. Des porcs gras et sales passaient. Il y avait un urubu apprivoisé, « Garcia », qui nous becquetait amicalement les pieds.



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